Entreprise & Covid-19 #4 : Assurance & perte d’exploitation

Quand le tribunal de commerce de Paris donne le LA!

L’actualité récente nous conduit à revenir sur un sujet récemment développé, celui de la posture des assurances dans le cadre de la perte d’exploitation subie pendant la période de confinement, et même postérieurement à celle – ci, par de nombreuses entreprises (Voir notre précédent article).

Ce 22 mai, en effet, le géant AXA, a subi son premier revers judiciaire contre un restaurateur parisien qui a osé s’élever contre lui! Oui, le Tribunal de commerce de Paris a, courageusement, rendu une ordonnance de référé sérieusement motivée en fait comme en droit. Que dit-elle? Quelles sont les voies ouvertes ? Comment agir ?

1- Ce que dit l’ordonnance

Le Tribunal désavoue AXA sur le caractère prétendument « inassurable » du risque pandémique. Il affirme, au contraire, que dans les cas où cette exclusion n’est pas contractuellement spécifiée, elle ne peut être mise en avant, pour justifier un refus d’indemniser la perte d’exploitation née de cette période de Covid 19.

Dans le cadre d’une procédure de référé (le juge des référés n’est compétent que dans l’urgence et l’absence de contestation sérieuse, ou le péril imminent), c’est avec courage, que la juridiction a condamné la société AXA au paiement provisionnel d’une somme (non négligeable) à valoir sur le montant de la perte d’exploitation qui sera réellement dû.

Le paiement de cette somme est assorti d’une astreinte (histoire que AXA la paye réellement). Un expert est désigné pour évaluer le montant de la perte d’exploitation dans son entier.

L’ordonnance de référé, a, ici, au moyen d’une décision plutôt nourrie, posé les jalons d’une bataille judiciaire dans laquelle les entreprises ont, à ce stade, repris la main !

2- Ce que l’ordonnance permet d’espérer…

Entendons nous bien… AXA a immédiatement indiqué qu’elle interjetterait appel de l’ordonnance. Probablement qu’elle initiera d’autres procédures (au fond) en parallèle. Le monstre de l’assurance ne reculera devant rien, probablement que toutes les manœuvres d’intimidations seront mises en oeuvre, pour éviter de bourse délier.

Mais cette décision a ceci de particulier qu’elle ouvre la brèche sur des points essentiels car :

– L’ordonnance s’adresse aux entreprises qui, ayant souscrit un contrat duquel il peut être déduit que la perte d’exploitation est couverte, sont dans une situation difficile. Elle leur permet d’emprunter la voie judiciaire la plus rapide qui soit, pour obtenir le déblocage par l’assureur d’une somme à valoir sur celle qui, plus tard, sera déterminée par un expert. Et ce; quelle que soit la procédure d’appel ou autre du chef d’AXA! C’est donc un levier financier d’urgence qui est déclenché, ici.

– Car une ordonnance de référé s’exécute quoi qu’il advienne, et le restaurateur bénéficiaire de la décision obtenue le 22 mai, pourra, immédiatement, faire procéder à la saisie des comptes d’AXA, tout comme toute entreprise qui, ici ou ailleurs, bénéficiera d’une décision taillée dans le même moule. A supposer même que demain, le juge du fond donne raison à AXA (ce serait tout de même étrange), au moins l’entreprise n’aurait – elle pas été asphyxiée par une quelconque stratégie dilatoire dont les assureurs sont si friands…

3- Comment dans l’immédiat, pouvons-nous agir ?

Ma précédente lettre préconisait déjà une action groupée, elle a suscité un nombre important de réactions, partages, et questionnements privés.
Je remercie toutes celles et ceux qui m’ont déjà saisie d’une analyse de leur contrat d’assurance, celles et ceux qui ont déjà donné leur accord sur le principe d’une action groupée, et maintiens qu’une telle action a, plus que jamais, sa place ici!

– D’abord parce-que se battre ensemble donne du poids et de la portée à une action. L’image déjà écornée de certains assureurs, supporterait-elle d’avantage la force d’actions groupées de ceux qui font l’économie d’un pays et qui souffrent face à ceux qui, pendant ce même Covid 19, n’ont jamais autant prospéré ?

Je reste convaincue de l’utilité et même de l’urgence qu’il y a à se faire entendre, ensemble, ici encore plus qu’ailleurs, où le milieu touristique (le poumon droit de notre économie) en premier lieu, ne sait pas comment, ni même si il va se relever.

Quant au poumon gauche, les TPE et PME, il est à quelques exceptions près, aux abois, sous coma… comment dire qu’on s’interroge vraiment sur l’hécatombe économique et sociale qui se profile…

– Ensuite parce-que, se battre ensemble et à frais partagés, c’est aussi rechercher ensemble une sortie judiciaire ou amiable de cette crise sanitaire et économique inédite et pleine de surprises. L’expérience montre que notre peuple sait s’élever contre le mépris, l’arrogance, et parfois l’outrage des géants, même à 5 ananas près. L’expérience montre aussi, que notre situation est singulière, et qu’elle ne peut se confondre à celle vécue ailleurs. Il nous revient de se l’approprier et de la défendre…

– Enfin, parce-que la crise du Covid 19 aura démontré encore, que l’union et la solidarité doivent reprendre leur place dans notre vie, y compris dans le monde des affaires. L’économie Martinique le vaut bien et c’est pour cette raison que, plus que jamais, je vous propose de vous joindre à notre projet d’action commune.

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à m’adresser un courriel à l’adresse suivante: gladys.ranlin@conseils-antillais.com

En attendant, prenez soin de vous et des vôtres.

Gladys Ranlin & l’équipe du cabinet

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